AUBE C'EST QUAND LE JOUR SE LEVE (extrait)




Pourtant, il s'agit de quelque chose de simple! Au lieu dit «La Mounine», entre Marseille et Aix,
un matin d'avril vers huit heures, à travers les vitres de l'autobus… eh bien qu'ai-je? Je ne parviens
pas à continuer…

                                                                                                                                                                              F. Ponge

Dans la nature, les atomes ne sont pas vraiment libres, ils interagissent entre eux. D'abord, très
souvent, les corps purs eux-mêmes, ou même les corps simples, se présentent sous forme de
molécules, c'est-à-dire d'assemblages d'atomes identiques ou différents.

                                                                                                                                                                       J.-F. Delpech

C'est surtout, je dois l'avouer, pour montrer que les plus récentes hypothèses viennent à l'appui
d'une conviction qui s'est peu à peu formée en moi, seulement destinée peut-être à justifier le choix
du sujet de cet écrit et le genre (proche du discours) que j'ai adopté pour le traiter, et selon laquelle
il est un état de la pensée où elle est à la fois trop agitée, trop distendue, trop ambitieuse et trop
isotrope pour être du tout exprimable, — et cet état correspond à celui d'un gaz nettement
au-dessus de sa température critique, alors qu'il n'est pas liquéfiable.

                                                                                                                                                                              F. Ponge

…par exemple, la pression du vent que nous sentons sur notre main, c'est l'impact des molécules
qui entrent en contact avec notre peau.

                                                                                                                                                                       J.-F. Delpech



I. Aube c'est quand le jour se lève et que l'on commence à regarder puis nécessairement réfléchir même si l'on prétend ne penser à rien ce qui est toujours commode


1. Concret
AB     E                                   U


2. Du jardin
Du jardin, il se dégage un air de mystère primitif. Il est rare pourtant qu'on s'y sente perdu.
Du jardin, on comprend mieux le reste : la maison, la rue, la difficulté de vivre.
Du jardin, on tire une certaine assurance.
Du jardin, quand on est dans la maison, on ne voit que les arbres et leur ombre portée dans les chambres, sur le lit.
Du jardin, on parle beaucoup. Surtout quand la nuit est tombée. C'est qu'il change et qu'on le suit.
Du jardin, on tire des fruits et des légumes, mangés non sans fierté.
Du jardin, le corps a balisé chaque mètre carré.
Du jardin, il n'y en a pas beaucoup dans cette ville. J'aime le béton, mais là n'est pas la question.
(Ne pas finir au pied de tous les jardins, catalogue, exhaustion.)

On entre aussi par le jardin.

D'une herbe tendre
à foison,
nous fîmes, ma coquine,
couchés l'un sur l'autre,
la moisson.



PHOTOGRAPHIE DU


JARDIN EN QUESTION



Comme je marchais dans le jardin réfléchissant aux apories de la-poésie- contemporaine-sans-parler-de-la-mienne, je butai sur le centre d'un réseau nerveux et maffieux, trame de l'histoire peu poétique suivante : quand la piscine est vide, il vaut mieux ne pas plonger, on pourrait s'abîmer les carreaux, et qui continue, non sans heurts, jusqu'à ces toutes dernières années.

… ne penser à rien ce qui est toujours commode, le jour où tu m'annonceras que tu me quitteras, que tu ne supporteras plus mes sautes d'humeur et mes échecs répétés, que tu auras rencontré un homme, qu'il sera digne d'élever tes enfants, qu'il ne traînera pas au lit le matin, une belle voiture et un grand frigo, etc.


3. Autour d'une maison

On y vivait à trop, une maison craquelée aux jointures, de bois et de saisons, à attendre qu'un rêve définitif ne remplace la réalité intermittente : l'amour, les fêtes, la lecture et le cinéma. On ne tolérait pas le reste. Pas les cons. Une maison charnière, en somme, articulant avec angoisse ce qu'on fut et ce qu'on allait devenir, très vite. Qui petit patron, qui cadre, employé de banque, qui chômeur, cinéaste, qui prof et qui mort ("qui qui dit mieux?").

Penché au balcon, dans l'ombre du platane, le cendrier du monde se remplit de nos erreurs. Et, se peut-il qu'un nuage nous obscurcisse?, nous sommes si détachés de ce qui pourrait arriver alors, que la chute en devient inévitable (naturelle).

Rez-de-chaussée : on dit "une cuisine, une salle à manger et un séjour (x mètres carrés)." Pour autant que cela fut aussi autre chose, des lieux où nous fîmes l'amour, où nous changeâmes, de façon notoirement identique de fois en fois, d'une cohérence souveraine, le monde, sans qu'il n'en fût d'ailleurs affecté, un poisson au four, le regard prolongé, plongé dans le jardin vert frais d'absinthe, un objet oublié, mon rythme.

Premier étage : "quatre chambres et une salle de bain". L'étage des amis, puis des ennemis. Les mêmes. Autant de malentendus dans l'espace, dans l'écho du monde, dans la comparaison, la jalousie et l'esquisse, déjà, de vies différentes.

Deuxième étage : "idem". Plus de lumière. On n'y comprenait rien pour autant. Le même ton, plus intime puisque nous y habitions. Les tissus, le hamac, les draps du lit, troués tachés, et cette idée d'écrire, tous les deux. Que nous poursuivons. Elle : couchée en travers du lit. Lui : à l'envers. Sur le dos. Nus, endormis à l'improviste. Un autre jour, les postures changées, ces corps fatigués d'amour, dans des dispositions soudaines de sommeil. Comme la mort surprend. Et cette envie d'écrire. Des fragments de texte, des textes courts, secs, les premiers essais qu'on se montre, arrachés à la pudeur, à la chair même (si on se trompait?). On en est toujours là.

"Et le ciel qui n'en finit pas de gémir" : Et le ciel qui n'en finit pas de gémir sur nos têtes, il est clair qu'avec tout ce bois, et les fantômes qui reviennent, l'angoisse à mesure que l'étreinte se desserre, que le bruit de la conversation est perdu, alors c'est qu'on est seul. C'est aussi qu'on est idiot de l'avoir oublié. Et les ogres ont des mains de chasseur-bombardier, les sorcières ne sortent qu'en costard-cravate, pour un saut à la Bourse et si elles se traînent en rentrant, c'est qu'elles ont les poches pleines — et les humbles en sont transformés.


4. Enquête en parallèle 1 (analyse grammaticale)

Du : en attente, contraction de "de le", on pénètre avec effraction, ce dont on parle (à propos);
jardin : et c'est la pluie qui s'ajoute à ce qui a déjà été dit, nom commun, masculin singulier, mouille, jardiner, jardinier, jardinage;
quand : conjonction de subordination, c'est le moment qu'on attendait, enfin le droit d'entrer, de s'asseoir dans la phrase qui commence souvent par là;
on : c'est nous tous et tous nous, pronom impersonnel, cf. infra I.5;
est : l'enjeu-verbe de toute une vie;
dans : espace clos, confiné, préposition, nous place quelque part, dans le décor, impossible de se dégager, jusqu'au cou;
la : précision, féminin, la phrase est comme un long (plus ou moins long) chemin vers la détermination de quelque chose dans le monde (mais qu'en est-il du "Père Noël n'existe pas"?);
maison : cf. supra I.3, elle figure aussi sur des photographies, sans doute, nom commun, féminin;
voit : verbe voir et les aveugles?, troisième personne du singulier, présent du regard, encore qu'on puisse être beaucoup à chaque fenêtre, on apprend d'abord à voir les choses dans les mots, puis également les mots dans les choses;
ne…que : adverbe, n'a pas véritablement de sens négatif, équivaut à "seulement", seulement les arbres, forme atone de la négation, enrouée, c'est qu'il fait frais dans la forêt;
les : sans que l'on ne sache, pourtant, déterminer encore son sexe, plusieurs;
arbres : plus proches des Hommes que beaucoup d'animaux, nom masculin debout pluriel, à vibrer, se balancer, comme s'ils pensaient, leur tête feuillue et le chant de tous les oiseaux du ciel.
lit : meuble d'une maison où l'on se tient le plus souvent couché, généralement seul ou à deux.

Que l'on rangeait dans la boîte à mots, cachée sur le rayon du haut.



PHOTOGRAPHIE DE LA


BOÎTE A MOTS EN QUESTION




5. Nous sommes tous des "on" (juifs et allemands)
"On", c'est le mot, pas bien long, derrière lequel se cachent les pires ignominies, lâchetés, dérives incontrôlables, "on a fait ça, on ne le fera plus, ce n'était pas nous, c'était on, eux, les", "on", les fascinations collectives, les rassemblements populaires, le "on est tous d'accord" qui fait si peur, de quoi peut-on être bien d'accord? que la vie est une trahison, que la mort est odieuse, ou alors du contraire?

Nous sommes tous des "on", perdus dans des programmes de masse, mercatique, sondage, associés malgré nous, de la pire espèce, aucune échappée, étiquette, le monde pourra toujours se diviser entre ceux qui achètent du lait et ceux qui n'en achètent pas, d'une impersonnalité de consommateurs.

Nous sommes tous des "on", abrupts, abrutis, sur la pente, dosant nos efforts vers une retraite innommable, adossés à trois principes qui nous firent si rigides que nous en perdîmes le sommeil, médiocres par-dessus tout et curieusement irresponsables.

Nous sommes tous des "on", pluralité singulière qui nous fit mal et qu'on divise pour le profit, alors des "je-on" et l'envie de dire des "jetons", comme des pièces ou de ceux qu'on jette, pour autant qu'on en ait fini (le pouvoir aussi se cache).


6. "Aube" c'est tout ce qui compte

Du jardin, quand on est dans la phrase et que se lève l'aube, claironne, "aube" c'est tout ce qui compte, c'est avant l'aurore aux doigts de rose, l'heure bleue, avant le commencement déjà sanglant, avant le langage et les actes préfabriqués, avant l'isthme langue de terre où l'on débarque chaque matin, en douce, clandestinement, pour empoisonner le monde, chaque jour un peu plus, mithridatiser les gens à l'horreur.

Du jardin, quand on est dans la phrase et que se lève l'aube, tonne, "aube" c'est tout ce qui compte, c'est du noir qui se fait gris, métal, lame, scie, blanchit, c'est lorsqu'on n'a rien promis, qu'on se sait vivre ou que l'on se touche respirer, c'est le trait blanc derrière la fenêtre, le trait blanc sous ta paupière vide, la fin du rêve, entre aujourd'hui et demain (le positif de minuit), une sorte de tremplin, sans ressort, élastique.

L'aube, c'est le temps d'avant le temps (c'est la lueur d'avant le Big Bang).
L'aube distribue l'espace — tout est encore possible.
L'aube indique, pointe, montre, ne dit jamais rien.

"Aube", infime vibration, grise, point à partir duquel s'étend, s'étire le monde, comme un livre qu'on ouvre, comme un livre qu'on oscille.
"Aube", c'est tout ce qui compte, quoique quand on compte, on n'arrive jamais à "aube" : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, etc.
"Aube", c'est tout ce qui compte, quoiqu'on ne compte que rarement jusqu'à l'aube.
"Aube", cet instant de surprise et une douceur jamais démentie.

Du jardin, quand on est dans la phrase et que se lève l'aube, pris d'une soudaine envie de transition, pause, je soulève mon désir de rien et me laisse porter jusqu'au lendemain, roue à aubes prochaines, qui me trouve vif, acéré, prêt à en découdre des ficelles du monde, des trucs que les tordus ont noués la nuit, à mon attention, et il n'est pas rare que je m'emberlificote dans la différence entre deux espèces de canards — c'est que le monde est doublé des mots.


7. Où est-on cité? (Marcel Proust)
"Je suis arrivé à un moment, ou, si l'on veut, je me trouve dans de telles circonstances, où l'on peut craindre que les choses qu'on désirait le plus dire - ou à défaut du moins de celle-là, si l'affaiblissement de la sensibilité, qui est la banqueroute du talent, ne le permettait plus, celles qui venaient ensuite, qu'on était porté par comparaison avec ce plus haut et plus sacré idéal à ne pas estimer beaucoup, mais enfin qu'on a lues nulle part, qu'on peut penser qui ne seront pas dites si on ne les dit pas, et qu'on s'aperçoit qui tiennent tout de même une partie même moins profonde de notre esprit, - on ne puisse plus tout d'un coup les dire."


8. Enquête en parallèle 2 (information)
elle remarqua des taches sur le vêtement la fois suivante où elle le sortit de son armoire, d'après leur emplacement, elle présuma que les taches étaient la semence du Président [the President's semen] — regardait par la fenêtre avec ses yeux grands ouverts pendant qu'il m'embrassait et — d'après le Président, "chaque personne, personne raisonnable" reconnaîtra que la fellation [oral sex] pratiquée sur le déposant tombe hors de la définition — je devenais folle parce que ce n'était pas très romantique — d'après Mlle Lewinsky, elle pratiqua la fellation sur le Président; il ne pratiqua jamais le cunnilingus [oral sex] sur elle — il répondit : "je regardais seulement pour être sûr qu'il n'y avait personne là dehors" — parfois, elle crut qu'il l'aimait aussi, ils étaient physiquement affectueux — le Président mit sa main sur sa bouche pendant une rencontre sexuelle pour la tenir tranquille — six cravates, un ancien presse-papiers montrant la Maison Blanche, un porte-cigares et cigarettes de table en argent, une paire de lunettes de soleil, une chemise de sport, une timbale — les deux ne se sont jamais totalement déshabillés — dans la Map Room de la Maison Blanche, le 3 août 1998, le médecin de la Maison Blanche préleva une ampoule de sang du Président en présence d'un agent du FBI et d'un représentant — une chimie qui était là avant et que nous étions les deux attirés l'un vers l'autre — il avait toujours l'habitude d'écarter les cheveux de mon visage — pendant que le Président continuait à parler au téléphone — des "relations sexuelles" lorsque la personne s'engage sciemment ou cause des contacts avec les parties génitales, l'anus, l'aine — Jim Chapman ou John Tanner, deux membres du Congrès — aux emblèmes de Santa Monica, une statuette de grenouille, un coupe-papier représentant une grenouille, plusieurs romans, un livre humoristique de citations et plusieurs livres anciens — Sonny Callahan — ce refus était lié à "la confiance et au fait de ne pas me connaître assez" — Dick Morris — elle l'appelait handsome; à l'occasion il l'appelait sweetie, baby — baissa ses pantalons — lors de leurs deux dernières rencontres sexuelles, les deux en 1997, il éjacula — pizza — que le Président était la source de l'ADN obtenu par la robe — la stoppa avant d'éjaculer — la poitrine, l'intérieur des cuisses ou les fesses de n'importe quelle personne — avez-vous quelque intérêt à essayer de me connaître en tant que personne? — il lui donna, parmi d'autres choses, une épingle — baissa ses pantalons — ou parfois dear — quel est mon numéro de téléphone? — le désir sexuel de n'importe quelle personne — et il récita mon numéro de téléphone privé et professionnel — à neuf reprises sur le Président — toucha sa poitrine, embrassant ses seins nus — examen RFLP plus fouillé, les marqueurs génétiques du sperme, qui correspondent à l'ADN du Président, sont caractéristiques — à un moment donné, le Président inséra un cigare dans le vagin de Mlle Lewinsky, puis mis le cigare dans sa bouche et dit — à chapeau, deux broches, une couverture, une statuette d'ours en marbre — il a bon goût après qu'ils eurent fini Mlle Lewinsky quitta le Bureau Ovale et marcha — chaque personne, personne raisonnable — à travers le jardin des roses — de un parmi 7.87 trillons de Caucasiens — il était généralement connu qu'elle fréquentait l'Aile Ouest les week-end — à la fois à travers ses sous-vêtements et directement, la conduisant à l'orgasme en deux occasions — le président n'éjacula pas en sa présence — qu'il avait dit qu'ils étaient tous deux "sensibles et plein de feu", et qu'elle le faisait se sentir jeune — bon goût — et une édition rare du Feuilles d'herbe de Walt Whitman[1].


9. De la tête et de ce dont elle est capable
D'une tête de celles dont on dit qu'elles sont en or, couronne des rois, à une hauteur inestimable, frappe le cuir cousu du ballon blanc et noir, lumineux, comme une pensée, en en détournant la trajectoire, quand les princesses sont au stade, c'est qu'on assurerait ainsi une qualification pour les demi-finales, les cheveux sur cette tête lancés du côté gauche de l'attaque, d'où venait le ballon, d'un coup sec, l'air fouetté, inversé, se déplace ainsi, ne pense pas "joli centre", ne pense à rien, tendu, juste tendu vers la sphère, sauter au bon moment, dans les lumières monstrueuses des projecteurs du stade, insecte fabuleux (n'est-ce pas là une définition de l'Homme en toutes circonstances?), le ballon, dévié donc, tourne sur lui-même jusqu'à confondre les couleurs, mêler le blanc et le noir d'un gris indistinct, le gardien, trop coloré, d'un envol sur sa gauche, sait depuis une fraction de seconde qu'il s'est trompé, à contre-pied, d'une tête, c'est trop bête, sait-il aussi qu'il est éliminé?, quoi qu'il en soit son savoir propositionnel éclate contre le sol, ses muscles rebondissent au ralenti sur l'herbe foulée, ses paupières s'abaissent, le ballon s'écrase, un temps, contre la transversale, le bois, au même moment, le bois blanc bouge quelques secondes, personne ne regarde la barre osciller, les princesses s'extasient, désespèrent, selon les camps, alors, peut-être lassé de cette attention phrastique, le ballon redescend brutalement vers les filets qui vibrent de l'une des rares preuves de succès sur cette terre.



PHOTOGRAPHIE DE LA


TÊTE EN QUESTION



10. Quand le texte prend la forme d'un polar 1 (intertextualité interne)
Loin de la main gauche qui tenait le volant, l'astre jaune sombre tourna autour de la voiture, projetant, lorsque celui-ci se réfléchit dans le rétroviseur sur la face du conducteur, sa lumière, glissant, à une vitesse proportionnelle à l'angle d'où elle venait, sur son bras et recouvrant sa main droite qui tenait fermement le volant.
Il avait brusquement fait demi-tour. Il avait oublié quelque chose. Quant à qui il était, ce qu'il faisait, nous l'ignorions encore.
Lorsqu'il revint, la lumière ne recouvrait plus que le sommet de certains édifices — tel immeuble locatif, une banque, la tour de télévision où il ne travaillait plus, à l'abri derrière de grands stores métalliques à larges lamelles qui descendaient en couinant comme des souris que l'on piétinerait.
La voiture de police qui le précédait dans la circulation chaotique de cette fin d'après-midi d'automne alluma brusquement sa sirène, et, se faufilant à travers le trafic, ne laissa voir, à celui qui, détachant son attention de son immédiat alentour, l'aurait encore suivie des yeux, que le halo bleu du gyrophare qui tourna sur les carrosseries métalliques que le véhicule officiel dépassait maintenant avec une rapidité croissante.
Il sortit une arme de la serviette de cuir clair posée sur le siège du passager. Elle forma une tache noire inhabituelle dans l'habitacle. Sans quitter la circulation des yeux, il en actionna le mécanisme comme on faisait dans les films pour en vérifier une dernière fois le fonctionnement…


11. La machine à traire (ou la machine à rire)

Modèle # BS1, BS1-X
Machine à traire à chariot avec un poste de traite et un bidon en aluminium de 40 lt.
Particularités techniques :
Pompe à vide à sec avec un débit de 180 lt/min à 50 kpa équipée avec un moteur électrique HP 0,75 (220V 50 Hertz).
Réservoir à vide en zinc avec une grande bouche pour permettre l'inspection et le nettoyage.
1 Pulsateur pneumatique alterné aux membranes avec un rapport de 60/40.
Gobelets inox avec une partie supérieure transparente.
Version BS1-X avec 1 pot inox de 40 lt.

Modèle # BS5, BS5-X
Machine à traire pour l'installation fixe composée de :
Pompe à vide à sec avec un débit de 180 lt/min à 50 kpa équipée avec un moteur électrique HP 0,75 (220V 50 Hertz) et réservoir à vide en zinc.
Régleur à vide et vacuomètre déjà montés sur le même réservoir.
Chaque pot trayeur en alliage d'aluminium de 30 lt avec un couvercle inox, gobelets inox avec une partie supérieure transparente, pulsateur pneumatique alterné aux membranes avec un rapport de 60/40.
Version BS5 X avec 1 pot inox de 23 lt.

Modèle # BS5M
Avec moteur à essence de 3.5 HP.

***

 L'unité de traite est universelle, mais il y a trois types principaux de traite :
• Traite en cruche placée à côté de la vache;
• Traite en pipeline où le lait est récolté directement dans un tank central de collection;
• Salle de traite où tous les équipements sont centralisés et la vache vient de se faire traire.

En dépit de la diversité de modes d'installation, toutes les machines à traire travaillent selon le même principe : le lait est récolté par l'action du vide (succion) dans l'unité de traite. La Figure 1 illustre les parties communes à toutes les machines à traire :

Le système à vide est composé d'une pompe à vide, un tank de réserve, un régulateur, la ligne de pulsations et les tubes à vide et forme un enclos fermé au monde extérieur;

Les pulsateurs modifient l'intensité du vide au niveau de la mamelle de manière à éviter la congestion et l'oedème des parois pendant la traite;

L'unité de traite est l'assemblage de quatre manchons trayeurs connectés au gobelet et munis d'une valve qui permet l'admission du vide;

Le système d'évacuation est composé des tubes à lait, de la ligne à lait, du bocal récepteur (cruche, bocal individuel) et de la pompe à lait et transporte le lait vers un tank de stockage.

Pour que la machine à traire fonctionne bien, l'activité de tous ces composants doit être bien coordonnée.


PHOTOGRAPHIE DE LA


MACHINE A TRAIRE


EN QUESTION


12. Mouvement (quand le couteau s'en fiche ou pour une autre dramaturgie)
Aube, au blanc d'une feuille de papier tu opposes
le jour qui naît,
une grisure du noir et la pâleur de l'ombre,
deux possibles, deux angoisses,
à cette présence diffuse de l'air qui tremble,
tu ouvres les yeux, mais ça ne suffit pas,
sous l'eau tout est trouble,
et sur la terre il ne fait alors guère plus clair,
le poignard derrière le dos masque,
à se saisir des choses, des Hommes — qui ne nous étonne plus —
et, finalement, c'est ce cri qui te pousse vers toi,
où nous sommes rassemblés,
qui en livres, qui en années.


[…]


[1] "Je chante le soi-même, une simple personne, séparée,
Pourtant je prononce le mot Démocratique, le mot En-masse.
[…]
Je chante la Femme à l'égal de l'Homme.
[…]
J'ai appris que vous demandiez quelque chose qui expliquât cette énigme, le Nouveau Monde,
Et qui définît l'Amérique, sa Démocratie athlétique,
[…]
Quand j'ai lu le livre, la biographie célèbre,
Est-ce donc cela, ai-je dit, ce que l'auteur appelle la vie d'un homme?
Et est-ce ainsi que quelqu'un, quand je serai mort et disparu, écrira ma vie?
(Comme si quiconque savait vraiment rien de ma vie,
Alors que même moi, pensé-je souvent, je ne sais rien ou si peu de choses de ma vie véritable,
Seulement quelques indications, quelques faibles indices et suggestions [indirections],
Que je cherche pour mon propre usage à retracer ici.
[…]
Aux Etats-Unis ou à l'un quelconque d'entre eux, ou à une ville quelconque des Etats-Unis : Résistez beaucoup, obéissez peu,
Dès que vous cesserez de mettre en question la soumission, vous serez complètement asservis
[…]
Une femme m'attend, elle contient tout, rien ne manque,
Pourtant tout manquerait si le sexe manquait, ou si le liquide de l'homme qu'il faut manquait.
Le sexe contient tout, corps, âmes,
Les significations, les preuves, les puretés, les délicatesses, les résultats, les promulgations,
Les chants, les ordres, la santé, l'orgueil, le mystère de la maternité, le lait séminal,
Tous les espoirs, tous les bienfaits, tous les dons, toutes les passions, tous les amours, toutes les beautés et toutes les joies de la terre,
Tous les gouvernements, tous les juges, tous les dieux, tous les meneurs d'homme de la terre,
Tout cela est contenu dans le sexe, en fait partie et le justifie."